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Professeure de mathématiques et ancienne informaticienne, Anne Gelly prépare activement sa reconversion en artisanat d’art. Entre cuir, céramique et modélisation 3D, elle invente une trajectoire unique, mêlant techniques ancestrales et technologies de pointe. Un choix guidé par la passion, l’autonomie et le goût du « fait main ».
Depuis sept ans, Anne Gelly enseigne les mathématiques. Avant cela, elle a œuvré pendant 25 ans dans l’informatique. Mais à un an et demi de la retraite, elle ne se projette pas dans l’inaction. Bien au contraire : « L’envie, c’est de faire autre chose, de préparer ma retraite en basculant vers une activité d’artisanat et d’art », confie-t-elle. Un virage à 180 degrés qui traduit une volonté de changement profond et une soif de création.
Anne Gelly ne se contente pas de bricoler : elle conçoit, découpe, assemble et innove. « J’ai commencé par la maroquinerie sans couture. Je fais mes patrons, je découpe, je tends… » Cette autonomie revendiquée est au cœur de sa démarche. Elle tient à être indépendante sur toute la chaîne de production : « Je ne dépends de personne, ni pour les patrons, ni pour les bandoulières. »
Ce goût de la liberté l’amène aussi à détourner des outils : « J’utilise une très vieille presse du XIXᵉ siècle pour embosser du cuir avec des tampons imprimés en 3D. » Un mélange assumé de tradition et de modernité.
Difficile d’abandonner complètement son passé d’informaticienne. Très vite, Anne intègre la modélisation 3D à son travail artisanal. Elle crée ainsi des objets uniques mêlant impression 3D et matériaux nobles : « Je m’amuse beaucoup à designer des vases étanches, ou des parties de sacs. »
Elle utilise le logiciel Blender pour modéliser certaines pièces, comme les flancs de ses sacs, qu’elle imprime ensuite en 3D. Ces éléments modernes viennent se greffer harmonieusement à des composants en cuir travaillés de manière traditionnelle.
Installée aujourd’hui à Vallauris, Anne renoue aussi avec une tradition familiale : la céramique. « Je suis absente de Vallauris depuis 34 ans, mais j’y suis revenue depuis cinq ans. La céramique, ici, c’est dans notre ADN. »
Elle ne se contente pas de monter des projets en lien avec des artisans : elle commence elle-même à travailler la terre. Là encore, elle explore un nouveau médium avec une approche hybride, mêlant son expérience, sa curiosité et son goût du détail.
Anne Gelly revendique un choix éthique et qualitatif dans ses matériaux. Elle privilégie des cuirs européens, des teintures à base d’eau et des tissus jacquard français ou espagnols. « Ce sont des teintures longues à sécher, mais qui permettent des effets bois, des effets loupe d’arme », explique-t-elle. Elle refuse les aplats de couleur trop simples, leur préférant la nuance et la subtilité, signes d’un travail patient.
Si son projet est mûrement réfléchi, il est aussi nourri par un plaisir évident : celui de créer. « J’aime bien m’amuser, mélanger les produits et les métiers. » Ses objets hybrides racontent cette joie de concevoir, de tester, d’inventer.
Ses sacs sont des puzzles de matériaux et de techniques : cuir, 3D, tissu, teinture… Chaque pièce est unique et raconte une histoire, entre passé et futur, art et technologie.
À travers son parcours, Anne Gelly illustre une reconversion réussie, pensée avec rigueur et portée par une véritable passion. Professeure le jour, artisane la nuit, elle incarne cette génération qui refuse les cloisonnements, qui mêle science et sensibilité, numérique et manuel. Un pied dans le XIXᵉ siècle, l’autre dans le XXIᵉ, elle trace son propre chemin.
RS + IA
2 août 2025