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Jean-David Blanc, du streaming à l’IA : « Ce qui compte, c’est ce qu’on crée, pas l’outil »
Fondateur d’Allociné puis de Molotov, Jean-David Blanc a toujours été en avance sur son temps. Jury au World AI Film Festival, il porte un regard éclairé sur l’évolution des technologies audiovisuelles, sans jamais perdre de vue l’essentiel : l’émotion, la création et l’accès pour tous.
Quand on demande à Jean-David Blanc de se présenter, il cite sans hiérarchie ses passions : « la technologie, le cinéma, la musique, certains sports, les enfants ». Une curiosité insatiable, nourrie d’expériences concrètes. Il est à l’origine de deux révolutions majeures dans la distribution de contenus en France : Allociné, créé au début d’Internet pour démocratiser l’accès à l’information cinématographique, puis Molotov, qui a réinventé la télévision en streaming.
Son rôle aujourd’hui en tant que membre du jury du WAIFF n’est donc pas un hasard. Il y évalue les œuvres en croisant son expertise technologique et sa sensibilité de spectateur.
Pour Jean-David Blanc, l’intelligence artificielle s’inscrit dans une longue lignée de ruptures technologiques qu’il a traversées et accompagnées. « Quand j’ai démarré, il n’y avait pas encore Internet », se rappelle-t-il. « On a permis aux gens de découvrir des bandes-annonces depuis chez eux, ce qui n’était pas possible à l’époque. »
Son approche reste inchangée : imaginer de nouveaux services pour « permettre aux gens de créer ou d’accéder aux contenus ». L’IA, selon lui, ouvre aujourd’hui un nouveau champ d’exploration. « C’est un moteur technologique qu’on peut appliquer à plein de choses : la création, la gestion, la compréhension, la découverte… Le champ d’application est infini. »
Pour autant, Jean-David Blanc ne cède pas à l’effet de mode. « L’ordinateur existe dans le cinéma depuis très longtemps. Depuis Lucasfilm, depuis Jurassic Park. » Ce que change l’IA, ce ne sont pas les images en elles-mêmes, mais les moyens nécessaires pour les produire.
« À l’époque, il fallait des moyens considérables. Aujourd’hui, un gamin de cinq ans peut créer quelque chose d’incroyable sur son smartphone. C’est ça, la vraie révolution. » Cette démocratisation, il y croit fermement. Elle rejoint son combat historique : rendre la technologie accessible pour amplifier la créativité humaine.
Quand il évalue les films en compétition au WAIFF, Jean-David Blanc se place d’abord dans la peau du spectateur. « Je regarde déjà comme un public : est-ce que le film apporte quelque chose ? La technologie doit être secondaire par rapport à la création. »
Il insiste : l’émotion, la narration, la vision de l’auteur doivent primer. L’IA, aussi puissante soit-elle, reste un outil. « Est-ce que le marteau est responsable de la qualité artistique de la statue ? Non. » L’humain, selon lui, demeure le seul véritable créateur : « C’est toujours celui qui a une vision qui fait l’œuvre. »
Pour Jean-David Blanc, l’IA n’a pas vocation à remplacer l’inspiration. Elle peut la stimuler, l’accompagner, faciliter l’exécution, mais jamais se substituer à l’auteur. « L’IA peut aider à imaginer des pistes, remplir des pages blanches. Mais à la fin, c’est l’humain qui décide, qui oriente, qui crée. »
C’est cette nuance qu’il défend dans les débats souvent polarisés autour de l’IA : ni enthousiasme aveugle, ni rejet dogmatique. Juste une certitude : ce qui compte, c’est la vision.
Depuis toujours, Jean-David Blanc anticipe les mutations culturelles apportées par la technologie. Avec Allociné, il a permis aux spectateurs de découvrir les films autrement. Avec Molotov, il a repensé la manière d’accéder à la télévision. Avec l’IA, il voit une troisième vague : celle de la création décentralisée.
Ce qui l’intéresse n’est pas tant la prouesse technique que le changement d’usage. « Ce qui m’enthousiasme, c’est quand une technologie transforme la manière dont on crée ou dont on découvre une œuvre. »
Jean-David Blanc, fidèle à lui-même, continue de jouer les éclaireurs. Au World AI Film Festival, il ne juge pas les effets spéciaux, mais la force d’un récit, l’audace d’un regard, la cohérence d’un univers. Il rappelle que l’IA n’a de sens que si elle reste au service de la création humaine. Une voix précieuse, au moment où le cinéma réinvente ses outils, mais ne doit jamais perdre son âme.
DB+IA 17/04/2025