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Pour Joy Cabanes, tout a commencé comme un jeu d’enfant. « Comme beaucoup d'enfants, on commence quand on est petit », confie-t-elle dans cette vidéo tournée à Antibes. À l'époque, elle cueillait sur le sable ces éclats de verre polis par la mer, sans vraiment se douter que cette habitude deviendrait un jour le socle d'une démarche créative et engagée.
Mais contrairement à la plupart des enfants, Joy n’a jamais arrêté. Ce qui était une simple curiosité est devenu une passion, puis un métier. Il y a six ans, elle fonde la marque Sable Vert, une ligne de bijoux entièrement conçus à partir de verre marin recyclé. Une initiative qui mêle l’amour de la mer, la sensibilité artistique et un engagement environnemental fort.
À travers Sable Vert, Joy donne une seconde vie à ces morceaux de verre que la mer rejette. Ce ne sont pas des pierres précieuses ni des perles rares, mais des déchets humains transformés par la nature et sublimés par la main de l’artiste. Elle les récupère, principalement sur les plages d’Antibes mais aussi dans d'autres coins du monde.
Chaque morceau est soigneusement sélectionné. « Je sélectionne les plus jolis morceaux, ou je les retaille s'ils ne sont pas très beaux, pour les monter en bijoux ensuite », explique-t-elle. Colliers, boucles d’oreilles, bagues : chaque pièce est unique, sculptée par le temps et les marées.
Derrière la beauté de ses créations se cache une réalité plus sombre : celle de la pollution humaine. Les verres qu’elle transforme proviennent souvent de bouteilles brisées, laissées sur la plage ou dans la nature. Avec le temps, ces éclats dangereux deviennent lisses, polis, presque doux au toucher. Mais avant d’en arriver là, il faut compter « une dizaine d’années, minimum ».
Ce processus naturel d’érosion est au cœur de la valeur des bijoux de Joy. Plus le verre est ancien, plus il est beau. « Plus ils sont parfaits et jolis, plus ça fait longtemps que le morceau de verre est dans l'eau », souligne-t-elle. Il y a dans ce travail une forme de poésie : le rebut humain devient bijou, l’oubli devient mémoire.
Même si Antibes reste son terrain de prédilection, Joy est une collectrice globe-trotteuse. « J’en ramasse un peu partout dans le monde j’avoue », dit-elle en souriant. Chaque plage devient un territoire d’exploration, chaque morceau de verre une trace laissée par l’humanité.
Son message est clair : il y en a partout. « À vous de chercher », lance-t-elle aux curieux. Cette abondance en dit long sur l’ampleur du problème de pollution, mais aussi sur le potentiel inexploité des matériaux dits « perdus ». Le verre poli devient ainsi un symbole : celui de la transformation possible, du gâchis à l’objet précieux.
Pour ceux qui souhaitent découvrir son univers, Joy expose tout le mois de septembre aux Casemates, sur le boulevard d’Aguillon à Antibes, en partenariat avec la ville.
Cette visibilité lui permet de toucher un public plus large, d’expliquer son travail et de faire passer un message. Car au-delà de l’esthétique, Sable Vert raconte une histoire : celle d’un monde où l’on pourrait, peut-être, réparer au lieu de jeter, transformer au lieu d’abandonner.
Le bijou devient ainsi un vecteur de sensibilisation. Chaque pièce que l’on porte raconte l’histoire d’un fragment de verre qui aurait pu blesser, polluer, ou rester enfoui. En le portant à l’oreille ou autour du cou, on l’honore, on le réintègre dans le cycle de la vie humaine.
Sans donner de leçon, Joy pose un acte fort : celui de faire du beau avec du sale, du précieux avec du jeté. Une forme de résilience esthétique, à la croisée de l’art, de l’artisanat et de l’écologie.
À travers Sable verte, Joy Cabanes redonne une voix à la mer et à ses déchets. Elle prouve qu’il est possible de faire autrement, de ralentir, de regarder autrement ce qui nous entoure. Son travail n’est pas seulement artisanal ou artistique : il est symbolique.
Dans un monde où l’urgence écologique ne cesse de croître, des initiatives comme la sienne méritent d’être vues, partagées, et soutenues. Car si l’on veut espérer transformer le monde, peut-être faut-il d’abord apprendre à transformer ses déchets.
MHF + IA