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À Valbonne, le « Printemps des Fleurs » ne célèbre pas seulement la beauté florale, mais aussi celles et ceux qui œuvrent à redonner du sens à notre lien avec les plantes. Maéva Bac fait partie de ces passeuses de nature. Venue présenter ses créations artisanales à base de plantes cueillies à la main, elle incarne une autre manière de faire, plus respectueuse, plus proche, plus vraie.
Dès les premières minutes de l’entretien, Maéva Bac affiche la couleur. Cueilleuse professionnelle, elle collecte feuilles, fleurs, graines et fruits dans son village de Tourtour et ses alentours. Le geste est simple, mais précis. Elle sélectionne elle-même ses matières premières, « dans les jardins privés, dans des espaces naturels, mais toujours avec autorisation ».
Ce lien étroit avec le territoire local, elle l’assume pleinement. « Les fleurs font vraiment partie intégrante de la matière que j’utilise », explique-t-elle, évoquant la diversité des espèces qu’elle transforme ensuite en tisanes, sels aromatisés ou poudres de plantes.
Chez Maéva, chaque étape de la production est pensée dans une logique écologique. Après la cueillette vient le séchage — naturel, à l’air libre. Pas de four, pas de déshydrateur industriel : « Je n’utilise pas d’électricité pour sécher mes plantes. Je travaille dans le respect des rythmes naturels. »
Ce choix s’inscrit dans une démarche globale. Elle refuse le plastique, privilégie les pots en verre, le carton et le papier pour le conditionnement. Même ses fournisseurs sont choisis pour leur conscience environnementale. « Tous mes choix sont guidés par une volonté de cohérence », insiste-t-elle.
Un aspect singulier de son travail est la cueillette dans les jardins de particuliers. Une pratique rare mais précieuse, selon elle. « Cueillir chez les gens, ça responsabilise les propriétaires. On vérifie que leurs jardins ne soient pas traités, et c’est aussi pour eux l’occasion de mieux connaître ce qui pousse chez eux. »
Cette dimension pédagogique est essentielle. En échange d’une cueillette, elle peut proposer une taille, une identification de plantes ou un produit fini. Ce donnant-donnant permet de créer un dialogue avec les habitants, qu’ils soient de la région ou néo-ruraux.
Plus qu’un métier, la cueillette est pour Maéva un engagement. Celui de retisser des liens distendus par l’industrialisation et la perte de savoirs. Ses produits ne cherchent pas à séduire par des artifices, mais par leur authenticité. « Je veux qu’on retrouve des goûts, des textures qui ne soient pas industrialisés. Des choses simples, directes. »
Sa démarche artisanale redonne sa place à la plante, non comme simple ingrédient, mais comme matière vivante. Elle cherche à éveiller les consciences, à susciter de la curiosité, parfois même de l’émerveillement. C’est là, dit-elle, que naît le respect.
Ce respect passe aussi par le temps. Celui qu’il faut pour reconnaître une plante, la cueillir, la sécher, la transformer. Pas question d’accélérer les processus. Le rythme est celui de la saison, du climat, de la nature. Et donc, parfois, de la pénurie. « Ce que je fais dépend de ce que je trouve. Il peut y avoir des années sans certaines plantes. »
Cette incertitude fait partie de l’aventure. Elle oblige à s’adapter, à observer, à attendre. Tout l’inverse d’une logique de rendement. Ici, la qualité prime sur la quantité.
En refusant les circuits traditionnels et l’industrialisation, Maéva Bac trace une voie alternative. Elle n’a pas de boutique en ligne tape-à-l’œil, ni de packaging standardisé. Elle vend en direct, lors de marchés ou d’événements comme le Printemps des Fleurs.
Ce choix a un coût — logistique, économique — mais il garantit une traçabilité absolue. Elle sait d’où viennent ses plantes, comment elles ont été cueillies, et peut raconter leur histoire. Une transparence devenue rare, mais précieuse.
À Valbonne, sa présence ne passe pas inaperçue. Elle attire les curieux, interroge les passants. « C’est rare de voir des produits comme les miens dans ce type d’événement. Ici, on célèbre les fleurs, mais on célèbre aussi une façon de vivre, plus respectueuse, plus consciente. »
Son stand est modeste, mais riche de sens. Il parle de simplicité, de retour aux sources, de savoirs ancestraux remis au goût du jour. Un contre-pied assumé à la société de consommation.
À travers son activité, Maéva Bac se positionne comme une passeuse de savoirs plus que comme une entrepreneuse. « Ma passion, c’est de transmettre le goût des plantes », dit-elle dès l’introduction. Cela passe par des échanges, des rencontres, des conseils, parfois même des ateliers.
Elle ne prétend pas tout savoir, mais elle sait observer, écouter, partager. Son savoir-faire, elle le tient d’une pratique patiente et d’un apprentissage empirique. Rien de figé, rien de dogmatique. Un rapport vivant à la nature.
Le métier de cueilleur, longtemps marginalisé, retrouve aujourd’hui un intérêt croissant. À l’heure du retour au local et du rejet des produits standardisés, il séduit par sa simplicité et sa sincérité. Mais il suppose aussi des responsabilités, notamment écologiques.
Maéva Bac en a pleinement conscience. Elle n’est pas là pour piller les ressources, mais pour les préserver. Sa pratique repose sur une connaissance fine des plantes, des saisons, des lieux. Une intelligence du vivant qui tranche avec la logique d’extraction habituelle.
Rencontrer Maéva Bac, c’est accepter de ralentir. D’écouter. De regarder autrement ce qui pousse autour de nous. De redonner une valeur aux petites choses, aux plantes oubliées, aux gestes patients.
C’est aussi une invitation à se réapproprier notre environnement. À ne pas tout déléguer à l’industrie, à reprendre la main sur ce que nous consommons. Bref, à redevenir un peu plus vivants.
Au « Printemps des Fleurs », Maéva Bac n’est pas juste une exposante. Elle est un trait d’union entre les plantes et les gens. Une voix douce mais essentielle, qui nous rappelle que la nature est là, à portée de main. Encore faut-il apprendre à la regarder.
DV + IA