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À Golfe-Juan, Menace l’Artiste, enfant du pays, réalise une fresque monumentale mêlant faune marine, mémoire locale et figures emblématiques. Un chantier de cinq semaines devenu déclaration d’amour.
Casquette vissée sur la tête, spray à la main, Menace l’Artiste peint sans relâche sous le soleil de Vallauris. Né ici, il y a aussi grandi, nourri par les souvenirs, les murs, les histoires.
« Je suis vraiment né ici, j’ai grandi ici. Donc tout ça, j’ai grandi avec toute cette histoire. On en entend parler, on l’apprend à l’école, on le vit au quotidien. »
Aujourd’hui, c’est à lui que revient la responsabilité de raviver un pan entier du patrimoine mural de Golfe-Juan, entre mer et mémoire. Une fresque de plus de 200 mètres, mêlant animaux marins, figures locales et symboles identitaires.
Sur les murs de la ville, un faux sous-marin se dessine, peuplé d’animaux marins.
« Là, je travaille une partie de l’énorme fresque… une raie, une tortue, un dauphin et évidemment la pieuvre, pour bien commencer la fresque. » Le choix du thème marin n’est pas anodin. Il s’ancre dans le paysage et dans la volonté de sublimer ce qui se cache sous la surface. « C’est une grosse volonté de représenter la beauté sous la mer. »
Mais l’œuvre ne se limite pas à la mer. Elle embrasse tout ce que Vallauris a de précieux : la poterie, l’agriculture, et les grandes figures qui l’ont marquée – Picasso, Jean Marais. « Pour nous, c’était important de faire quelque chose qui représente un petit peu l’histoire de la ville. »
Entamée il y a bientôt un mois, la fresque avance vite. Très vite.
« Demain, ça fera un mois. En tout, il y a entre 200 et 230 mètres de fresques avec des hauteurs différentes. Je pense que ce sera fini la semaine prochaine. » Soit environ cinq semaines de travail intensif, seul face au mur, entre aérosol et pinceau.
Côté technique, l’artiste est polyvalent, mais reste fidèle à ses outils de prédilection.
« Je travaille essentiellement au spray. Il y a beaucoup de sprays, mais pas que. De la peinture murale pour les fonds, parfois de l’aérographe, du marqueur, du pinceau… Ça dépend. » Environ 80 à 90 % de la fresque est réalisée à la bombe.
Avant lui, une autre fresque habillait déjà le mur.
« Il y avait une fresque qui avait été faite en 2000, donc il y a 25 ans. Elle retraçait déjà un peu l’histoire de la ville, mais elle était abîmée. Le mur commençait à s’abîmer, les peintures de l’époque n’étaient pas aussi performantes. »
Pour Menace, cette reprise est aussi un devoir de mémoire.
« C’est un honneur de pouvoir la refaire, parce que j’ai aussi grandi avec cette fresque. On passe par là pour aller à la plage depuis qu’on est tout petit. » Et de glisser un mot à ses prédécesseurs : « Un gros big up à tous ceux qui ont participé à la fresque il y a 25 ans. J’espère qu’ils seront contents de moi. »
Sur le trottoir, les passants s’arrêtent, observent, questionnent, parfois klaxonnent.
« Même si souvent il y a des gens qui klaxonnent, il y a beaucoup de réactions. Beaucoup de bienveillance. Les gens qui passent avec leurs enfants, qui bloquent sur un détail, qui prennent cinq minutes… C’est que de la force. »
Et pour celui qui connaît tant d’habitants par leur prénom, les encouragements prennent une saveur particulière. « C’est cool d’être encouragé par les gens qu’on connaît, mais surtout par ceux qu’on connaît pas. »
Derrière cette fresque, il y a plus que de la peinture. Il y a l’affirmation d’un lien intime entre un artiste et sa ville, entre un mur et son histoire. En conjuguant mémoire collective, biodiversité marine et gestes d’aujourd’hui, Menace l’Artiste insuffle une nouvelle vie à ce fragment de paysage urbain.
Et lorsqu’on lui demande ce qu’il retient de cette aventure, il sourit, le regard tourné vers son œuvre encore inachevée :
« J’espère qu’ils seront contents de moi. »
DB+IA 08/06/2025