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Sur les terres du Domaine des Escaravatiers, l’histoire de la vigne croise celle des hommes. Mercredi 18 juin 2025, à l’occasion d’une remise de médailles pour les agriculteurs du Var organisée par Estérel Côte d’Azur Agglomération, Pascal Costamagna a accueilli les invités au cœur de ce lieu chargé de mémoire, qu’il façonne avec passion.
Pascal Costamagna ne se contente pas d’être architecte. Il est aussi le gardien d’un domaine acquis par son arrière-grand-père en 1927. « Ce domaine a été acheté par mon arrière-grand-père en 1927. C’est une très belle histoire. Il était ouvrier à l’usine de tuiles des Rebelles, à Puget-sur-Argens, en est devenu contremaître, puis l’a rachetée avec un crédit vendeur. »
Une success story locale, dans laquelle le travail acharné et l’attachement familial jouent un rôle central. En reprenant le flambeau, Pascal devient la quatrième génération à s’occuper du domaine. « Je suis architecte de profession, mais je suis aussi gérant du domaine qui appartient à ma famille. »
Au-delà de la dimension familiale, le domaine porte en lui les traces d’une occupation bien plus ancienne. Lors de travaux menés avec son grand-père il y a près de 50 ans, Pascal fait une découverte étonnante : une stèle romaine.
« On tombe sur une plaque en marbre... C’est à Caius Novellius, vétéran de la neuvième légion, une légion perdue. » La stèle, traduite avec l’aide d’un archéologue, confirme que la vigne a peut-être été cultivée ici depuis 2 000 ans. « Rome donnait des terres à ses légionnaires après 25 ans de service. On avait alors des citoyens-propriétaires en armes aux portes de l’Empire. »
Cette trouvaille ancre le domaine dans une continuité historique rare, faisant de Costamagna non seulement l’héritier d’un patrimoine familial, mais aussi d’un terroir millénaire.
Le domaine n’est pas seulement cultivé, il est aussi bâti, et avec exigence. Architecte depuis 43 ans, Pascal Costamagna a dessiné chacun des bâtiments présents sur le site. Le caveau de vente, les toitures, les nouvelles constructions en cours… tout porte la marque de son savoir-faire. Mais au-delà de l’esthétique, c’est une fidélité aux matériaux de son histoire familiale qu’il revendique.
« Mon honneur ! On ne peut pas imaginer dans ce domaine construire autrement qu’en briques », dit-il avec une conviction empreinte de respect pour ses ancêtres, fabricants de tuiles. La crise pétrolière a mis à mal cette tradition, mais aujourd’hui, il renoue avec elle. « Je suis en train de construire tous les nouveaux bâtiments en briques. »
L’anecdote est saisissante. Dans les bâtiments du domaine, les toits sont recouverts de tuiles anciennes, souvent marquées de symboles : trèfle, carreau, sablier... Un système ingénieux utilisé à la fin du XIXᵉ siècle. « 90 % des maçons étaient illettrés. Ces symboles leur permettaient de reconnaître les tuiles selon l’usine. »
Un savoir-faire artisanal que Pascal perpétue en restaurant les toitures avec les matériaux d’origine. « J’ai couvert ce bâtiment avec des tuiles plates du XIXᵉ siècle, celles qu’on utilisait pour les grandes surfaces. »
Pascal Costamagna ne limite pas son empreinte architecturale à son propre domaine. Il a œuvré pour de nombreux autres vignobles emblématiques de la région. « J’ai à mon actif une quarantaine de domaines viticoles. Je travaille pour Château Paquette, pour la Bouverie, pour le Rouet... »
Un réseau d’amitiés et de collaborations qui se retrouve dans l’événement du jour, où les médaillés sont, pour la plupart, aussi ses clients et amis. « Tous les gens qui ont été médaillés sont mes amis », précise-t-il avec une certaine fierté.
Le Domaine des Escaravatiers est bien plus qu’une exploitation agricole. C’est un lieu de mémoire, un chantier vivant, un point d’ancrage pour une histoire qui continue de s’écrire. En mêlant l’architecture, l’agriculture, et l’histoire, Pascal Costamagna incarne une vision du patrimoine enracinée et vivante.
Il ne revendique pas une lignée romaine, mais il reconnaît humblement que son domaine est construit sur des fondations solides : celles du temps long, du travail bien fait, et d’un amour inaltérable pour la terre.
BP + IA
18 juin 2025