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Romane Brassy n’a pas hérité d’un atelier familial ni grandi au milieu des serres. Elle est « tombée dans les fleurs un peu comme ça », raconte-t-elle avec simplicité. Originaire de Haute-Savoie, c’est par hasard qu’elle découvre la Côte d’Azur il y a dix ans. Mais une fois installée à Cannes, elle ne la quittera plus : « Mer, palmier, soleil... Je suis jamais repartie. »
Ce qui aurait pu rester une escapade ponctuelle devient le point de départ d’une reconversion passionnée. Attirée par le naturel et l’artistique, Romane tente un stage dans le monde floral. « Ça s’est fait comme ça », dit-elle. Depuis, elle n’a plus quitté les étals du marché Forville, où elle vend des fleurs depuis quatre ans à son compte.
Installée au cœur de Cannes, Romane a fait un choix fort : ne travailler qu’avec des fleurs locales et de saison. « C’est la priorité », insiste-t-elle. Deux fois par semaine, elle se lève tôt pour se rendre directement chez les producteurs. Un engagement qui n’a rien d’anodin : dans un marché souvent dominé par l’importation, sa démarche se distingue par sa cohérence écologique et sa sincérité artisanale.
C’est précisément ce choix qui attire l’attention de la mairie et de la Chambre des Métiers. En pleine effervescence du Festival de Cannes, où l’apparence et l’éphémère règnent souvent en maître, Romane propose l’inverse : des bouquets vivants, enracinés dans le territoire, empreints de sens.
Mais sa reconnaissance ne s’arrête pas à la démarche locale. Car Romane Brassy est aujourd’hui une fleuriste incontournable du Festival de Cannes. Derrière les projecteurs, ses compositions florales accompagnent les événements les plus sélects. « J’ai eu la chance de travailler pour Cartier, Dolce & Gabbana, Carla Otto… »
Chaque année, elle participe à l’habillage floral des suites prestigieuses de l’hôtel Martinez ou à des galas exclusifs sur des plages privées. « Cette année, c’était pour un gala Dolce & Gabbana. » Une expérience qui allie rigueur professionnelle et sensibilité artistique. « Ce sont des gros clients, et c’est une vraie récompense de notre travail. »
Au-delà du décor, Romane évoque une dimension plus intime de son métier. Ce qui la bouleverse, ce n’est pas l’événement en lui-même, mais la réaction des personnes face à ses créations. « C’est quand la personne voit ce qu’on a créé, que ça la touche au plus profond d’elle-même. »
Pour elle, le bouquet n’est pas un objet, mais un message. Il parle sans mot, mais suscite l’émotion. Et dans ce moment fugace de réception, se joue tout le sens de son travail : « Moi, c’est cette connexion-là qui me parle. »
La reconnaissance institutionnelle du 22 mai prend alors tout son sens. Elle dépasse l’aspect symbolique pour souligner une réalité souvent oubliée : celle des artisans qui œuvrent dans l’ombre d’événements d’envergure.
« Il faut parler des artisans, surtout pendant le Festival de Cannes », martèle Romane. Elle n’est pas la seule à faire vivre l’événement en coulisse. Derrière chaque bouquet, chaque table fleurie, il y a des heures de travail, de préparation, d’ajustement. Un savoir-faire, mais aussi une passion.
Le prix qu’elle recevra ce jeudi n’est donc pas une simple médaille. C’est une manière de mettre en lumière ces professionnels invisibles, ces métiers manuels et créatifs qui donnent leur âme à la fête.
Son quotidien, pourtant, reste humble. À l’écart des projecteurs, Romane continue de tenir son stand au marché Forville, où elle vend ses compositions aux habitants et aux passants. Elle propose aussi des abonnements floraux pour des boutiques et des restaurants locaux. Une activité répartie « entre le marché et les abonnements ».
Mais cette simplicité ne doit pas masquer l’ampleur de son rayonnement. Car même si elle compose des bouquets dans sa petite échoppe, ces derniers voyagent loin. Ils s’invitent dans des événements internationaux, font partie du décor des marques de luxe, et ajoutent une touche d’authenticité à des moments parfois très codifiés.
Romane Brassy incarne ainsi une nouvelle génération d’artisans : exigeante sur la qualité, engagée sur l’origine des produits, soucieuse de l’impact de son travail. À l’heure des grandes préoccupations écologiques et de la relocalisation, elle propose un modèle concret : celui d’une économie de proximité, d’un artisanat valorisé, et d’une créativité enracinée dans un territoire.
En la récompensant, la ville de Cannes et la Chambre des Métiers rappellent que le prestige ne se mesure pas seulement en paillettes ou en montées de marches, mais aussi dans la constance et la sincérité d’un engagement.
Ce jeudi 22 mai 2025, Romane montera à sa manière les marches de la reconnaissance publique. À 16h, lors d’une cérémonie organisée conjointement par la mairie et la CMA 06, elle recevra un hommage pour son rôle dans le rayonnement du Festival de Cannes.
Un moment qui viendra couronner un parcours atypique, une passion sincère et un engagement total. Loin du strass, mais en plein cœur de la réalité.
BP + IA
21 mai 2025