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« Je suis souvent la clé »
Zsuzsanna Kiss ne se présente pas d’abord par son prénom, mais par sa fonction, son rôle, son engagement. Présidente du comité local de l'association Valentin Haüy à Sophia-Antipolis depuis 25 ans, elle incarne une forme de militantisme discret mais opiniâtre : rendre à des milliers de personnes aveugles ou malvoyantes une chose précieuse – leur autonomie.
Derrière sa voix calme, une certitude : aider, c’est avant tout comprendre. Et pour comprendre, il faut d’abord écouter, puis apprendre à « voir autrement ».
« L’association existe depuis 135 ans »
L’association Valentin Haüy, reconnue d’utilité publique, agit depuis plus d’un siècle pour les droits et l'inclusion des personnes déficientes visuelles. À Sophia-Antipolis, le comité que dirige Zsuzsanna Kiss propose un large éventail d’activités. « Nous aidons des personnes aveugles et malvoyantes à retrouver leur autonomie. »
Cela passe par le sport, la vie sociale, mais aussi l’accès à la culture. Dans les musées, l'association met à disposition des supports tactiles, sortes de miniatures d'œuvres, à toucher pour ressentir ce qui est invisible.
« En les touchant, nous pouvons imaginer ce que c’est », explique-t-elle. Cette approche sensorielle permet à chacun de construire sa propre image mentale de l’œuvre, de s’approprier un monde dont la vue ne serait plus le seul vecteur.
« Nous formons des personnes jusqu’à 90 ans »
L’autre pilier du comité, c’est la formation. Grâce aux nouvelles technologies, Zsuzsanna et ses bénévoles accompagnent les personnes âgées dans l’apprentissage de l’informatique, de la téléphonie, et plus récemment, de l’intelligence artificielle.
« Nous faisons beaucoup de formations téléphoniques pour les personnes non-voyantes et malvoyantes », souligne-t-elle. Loin des clichés, elle rappelle que l’âge n’est jamais une barrière pour apprendre : « Des personnes de 90 ans s’initient aux outils numériques. »
« Sensibiliser les plus jeunes est essentiel »
L’association intervient aussi dans les écoles. Pas seulement pour expliquer, mais pour faire expérimenter.
Zsuzsanna évoque une élève, invitée à se déplacer les yeux bandés : « Qu’est-ce que ça veut dire de ne pas voir ? La navigation devient floue, l’équilibre est perdu. » Ce type d’atelier permet de prendre conscience, physiquement, de la désorientation vécue par les personnes non-voyantes.
Elle insiste sur l’importance de former les plus jeunes à adopter les bons réflexes : accompagner avec respect, guider avec précision, ne pas infantiliser. Des gestes simples, mais cruciaux.
« Dire “là-bas”, ça ne veut rien dire »
L’une des leçons les plus concrètes partagées par Zsuzsanna concerne notre langage quotidien. Pour une personne non-voyante, les repères classiques – “là”, “à côté”, “devant” – n’ont pas de sens sans contexte.
« Il faut dire à gauche, à droite, au-dessus, derrière… sinon, on ne peut pas s’orienter. »
Ces petits ajustements, que les bénévoles de l’association s’emploient à faire connaître, peuvent changer le quotidien de quelqu’un. « Habituellement, nous rencontrons beaucoup de bienveillance », ajoute-t-elle, soulignant que la sensibilisation reste la clé.
« Une demi-journée qui change tout »
Pour approfondir cette sensibilisation, l’association organise des sessions immersives : une demi-journée durant laquelle les participants vivent, en partie, les défis des personnes malvoyantes.
Ces expériences, très souvent marquantes, renforcent le lien social, changent les regards et préparent à une meilleure cohabitation.
Un combat ordinaire, une mission essentielle
Zsuzsanna Kiss ne se met jamais en avant. Elle parle toujours au pluriel : « nous faisons », « nous aidons ». Mais dans chaque mot, on devine l’énergie d’une femme profondément investie, lucide et déterminée.
À travers ses actions et celles de l’association Valentin Haüy, c’est toute une société plus inclusive qui se dessine. Pas à pas. Avec bienveillance. Et sans jamais perdre de vue l’essentiel : redonner à chacun la possibilité de vivre pleinement.
DV + IA